Be You @ BU Magazine 2023

En francais s'il vous plaît

Une fois seule dans ma chambre de résidence, j’ai décidé d’aller me promener sur le campus, question d’apprivoiser l’endroit. En mettant les pieds dehors, j’ai tout de suite aperçu des dizaines d’autres nouveaux, comme moi, en train d’emménager. Tout autour, des volon taires aux chandails mauves leur souhaitaient la bienvenue, leur offraient un coup de main pour s’installer, les aidaient à se retrouver. J’entendais même quelques Québécois épar pillés parmi la foule. Plus j’approchais du cœur du campus, le quad, plus je ressentais l’euphorie qui régnait en cette première journée de Orientation Week , une semaine d’activités d’intégration qui rend la transition tellement plus simple. Les pre mières années s’entremêlaient aux plus vieux, qui les prenaient déjà sous leur aile. Tout au tour, une foule de Gaiters de partout, rassem blés par leur esprit de communauté dans ce décor de carte postale aux briques rouges. À Bishop’s, on dit souvent qu’on vit in the bubble. Cette bulle, elle représente ce petit monde unique dans lequel nous orbitons tous ensemble, que ce soit dans la classe, dans les nombreux clubs ou dans les estrades – et je l’expérimentais pour la première fois. Dès cette première semaine, je me suis sentie accueillie

et épaulée ; jamais on ne m’a jugée pour mon français. Aujourd’hui, j’habite avec trois an glophones qui sont devenues mes meilleures amies, et vous savez ce qu’elles m’ont répon du quand je leur ai dit que je parlais français? “That’s so cool!” Et dans la salle de classe ? Là non plus, mon français n’a jamais été un obstacle. Au début, je me sentais un peu déstabilisée, mais mes profs étaient là, le sourire aux lèvres, pour ai der la petite Manu qui parle français. Le Writing Center, un service gratuit qui permet aux étu diants de réviser leurs dissertations avec des consultantes qualifiées, est devenu mon meil leur ami. Au final, je n’ai même pas été tentée de remettre mes travaux en français - ce qui est possible pendant la première année - tant j’ai été épaulée. Maintenant, c’est aussi natu rel pour moi d’écrire en anglais qu’en français - même si ma langue maternelle gardera tou jours une place spéciale dans mon cœur. Au fil de ces dernières années, Bishop’s est devenue ma deuxième maison. Plonger dans cet univers unique, malgré mes craintes, a changé ma vie. Peu importe d’où tu viens ou quelle langue tu parles, il y a une place pour toi ici. Il ne te reste qu’à dire oui !

Quand j’ai annoncé à mes proches, il y a trois ans, que j’avais choi si une université anglophone, ils m’ont tous répondu la même chose, incrédules : « Ah, oui? » Ma décision d’étudier dans une langue autre que mon francais maternel leur semblait insensée ; ils se sont tous mis à vanter mon courage, question de masquer leurs craintes. Je les partageais, moi aussi, ces craintes. Amoureuse des langues et du voyage, j’avais toujours voulu m’ouvrir sur le monde et amé liorer mon anglais en étudiant mais, alors que cette perspective lointaine devenait réalité, j’avais un nœud dans le ventre. Et si mon an glais n’était pas assez bon ? Et si je n’arrivais pas à m’intégrer ? Et si je me sentais comme un imposteur pendant trois ans ? Le jour J, je suis partie de chez moi le cœur serré. En plus des craintes habituelles, j’appré hendais le moment où j’allais devoir vivre en anglais. Je plongeais dans un monde inconnu où je n’avais aucun repère, pas même la langue.

Author : Manu Bissonnette Program : Bachelor of Arts – Hispanic Studies with Teaching English as a Second Language (TESL) minor, minor in English

Manu, Trois-Rivières, Quebec

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